Les humains

L'Empire d'Heliador

Quand j’ai visité l’Empire d’Heliador pour la première fois, les humains qui l’habitaient étaient à un stade d’évolution encore peu développé. Je sentis néanmoins en eux une profonde volonté de faire de grandes choses. C’est pourquoi je me suis intéressée de plus près à la gestation de cet empire. Il faut dire que les humains, malgré leur faiblesse naturelle, peuvent être parfois étonnants si les conditions sont propices. Et elles l’étaient pour ces humains là. Les terres où devrait s’étendre plus tard ce qui serait le territoire humain le plus puissant du monde se situent à l’Est du Beau Pays, au delà de la mer Delfin. La géographie de cette partie du monde était plus que bénéfique. Le relief, étonnamment plat, offrait à la vue de vastes plaines, et quelques collines vers le Sud Est. Aucune montagne ne traverse l’horizon, si ce n’est celles de la fin de la cordillère des Abassydes. Plaines herbeuses et forêts luxuriantes s’étendent donc sur l’essentiel de ce territoire, coupé de quelques fleuves au débit paresseux.
Le climat est doux, et nulle part dans l’Empire les humains n’ont à subir un froid glacial. Les pluies étant fréquentes, une végétation riche et variée couvre ce territoire, permettant à de nombreux troupeaux d’animaux herbivores d’y élire domicile. Décidément, toutes les conditions idéales nécessaires au développement d’une civilisation semblent être réunis. C’est sans doute la raison de la montée en puissance fulgurante de ce peuple humain, qui s’est rapidement élevé au dessus des autres civilisations humaines pour s’imposer d’emblée en dominant. Et cette situation n’a fait que se renforcer au fil du temps. Je suppose que les Empereurs y ont été pour grand-chose. L’organisation de l’Empire est en effet centralisée sur la personne de l’empereur ( bien qu’il ait des intermédiaires siégeant dans les villes secondaires ), qui représente la plus haute instance et exerce un pouvoir absolu sur ses sujets. J’ai moi-même été surprise de cette organisation, connaissant les dérives de tels systèmes auparavant. Mais j’ai vite remarqué que ma surprise n’était pas fondée. Le pouvoir impérial n’est nullement contesté. D’ailleurs, l’Empereur ne semble pas donner de raisons à une éventuelle contestation. Au lieu de profiter de ce pouvoir à des fins personnelles comme cela s’est déjà vu, les empereurs Heliadoriens oeuvrent pour le bien de l’Empire et de leurs sujets, qui leur font confiance et les vénèrent. C’est selon moi la principale raison du fort développement de ce pays. Le peuple Heliadorien fait preuve d’une organisation stricte mais pas sévère. Chacun occupe une place dans la société, et se consacre entier à cette tâche. S’il l’accomplit correctement, un Heliadorien, qu’il soit paysan ou noble, se voit honoré et respecté par ses pairs. Il n’existe aucun conflit interne, et une cohésion sociale étonnante ( et même, je dois l’avouer, plus forte que chez les elfes ) règne dans la société Heliadorienne. De fait, l’établissement des premières villes et leur développement c’est fait rapidement. Lhynn, la capitale, est une ville aujourd’hui riche et prospère. Siège du pouvoir politique ( car abritant le Palais impérial ), économique ( car abritant aussi les sièges des principales Guildes ), et militaire ( l’Académie de Lhynn forme les soldats les plus expérimentés, officiers de l’armée Felthianne), Lhynn est aussi un centre culturel, car c’est là que se trouve la plus grand concentration d’artistes, notamment la Maison des artistes, où logent les plus prestigieux d’entre eux et sont exposées les œuvres les plus fameuses. La capitale abrite une garnison spéciale, dont les membres sont triés sur le volet et proviennent de l’élite de l’armée régulière d’Heriador. Ceinte de solides murailles, Lhynn remplit parfaitement son rôle d’ultime refuge. La ville n’a en effet jamais été prise, et ce malgré de nombreuses tentatives d’ennemis divers. Située à une centaine de kilomètres de la mer, Lhynn n’est pas la seule ville importante de l’Empire. Les villes de Balinör, Meryl (premier port impérial), Sol-Enderney et de Lhynnör sont des villes secondaires, chacune capitale d’un duché. Les quatre duchés sont de taille égale, et concentrent des richesses complémentaires. Le cinquième duché, ayant pour capitale Lhynn elle-même, relève de l’autorité directe de l’Empereur, alors que dans chacune des autres villes siège un représentant de son pouvoir. Régulièrement, une fois par mois, l’Empereur reçoit ses quatre représentants à Lhynn. D’autres villes et villages furent par la suite établis, mais les cinq nommées restent les plus importantes. En plus de cela, l’Empire dispose d’une importante forteresse. Située à la frontière avec les Terres Barbares, Carduel est la plus importante concentration de forces impériales. L’Empire ayant durant toute son histoire subi de nombreuses et régulières invasions des barbares venus du Nord, la décision d’implanter à la frontière une garnison stable fut prise. Ceci mena à la fondation de Carduel, puis par la suite à la construction d’un mur. Ce mur n’est pas comme les autres. Quand je l’ai vu pour la première fois achevé, j’ai du attendre un instant pour reprendre mes esprits. Je ne savais pas les humains capables d’une telle démesure….Le mur, haut d’une bonne centaine de pas, est suffisamment large pour que douze hommes puissent marcher de front sur le chemin de ronde ! C’est tout bonnement phénoménal…Une unique porte permet de passer ce mur monumental, et le corps de garde n’est autre que…Carduel elle-même. La garnison qui la défend, s’est au fil du temps professionnalisée dans la défense de cette frontière précise, aussi a-t-elle pris le nom de Légion Frontalière. Ses hommes, choisis parmi les meilleurs soldats Heliadoriens, se sont aguerris au fil des combats contre les barbares et ce corps d’armée s’est quelque peu vu entouré d’un mythe.
Il est clair que l’Empire est un pays guerrier. C’est pourquoi mon enthousiasme pour ces humains est quelque peu retombé. Les efforts des derniers empereurs étaient presque totalement consacrés à la mise en place d’une armée puissante. Les troupes Heliadorienes ont au fil des guerres acquis une réputation d’invincibilité, et nul doute qu’elle ne soit infondée. Le spectacle des légions en marche a quelque chose d’imposant, et le départ d’une armée est célébré par les habitants comme une grande fête. Parfaitement organisée, à l’armement de qualité supérieure, à l’entraînement poussé, l’armée impériale doit présenter une menace plus que sérieuse. Si jamais les elfes avaient à lutter contre elle, j’ai la certitude que cela ne se fera pas sans de grandes pertes.
Cet Empire presque parfait pourrait présenter un exemple, si ce n’est des événements qui m’ont fait prolonger mon dernier séjour alors que je projetais de partir plus à l’Est. Il s’est en effet passé des choses qui m’ont fait émettre des doutes sur la stabilité future de l’Empire. En effet, j’ai pu constater que le fils de l’Empereur, un certain Adebyr, avait un tempérament bien différent de son père. Alors que celui-ci règne dignement dans la lancée de ses justes prédécesseurs, Adebyr, lui, nourrit des ambitions qui pourraient s’avérer dangereuses dans le futur. Malheureusement, l’Empereur se fait vieux, et son fils montera sur le trône impérial après sa mort, ce qui n’augure selon moi rien de bon.
J’ai le pressentiment que le cours des choses risque de changer, je vais devoir surveiller ce peuple humain…..

Les Baronnies

A côté de l’Empire, juste à l’Est, se trouve un territoire lui aussi habité par les hommes. C’est sur ce territoire que mes pas me menèrent par la suite. En passant la frontière, je pus clairement sentir que je changeais de territoire. C’est comme si je quittais un monde pour en découvrir un autre. Les Baronnies présentent en effet un visage bien différent de celui de l’Empire. Le relief déjà, est bien plus varié. Ici, plaines, collines, plateaux et montagnes servent d’habitat à de nombreuses colonies humaines. Cette diversité déteignait d’ailleurs selon mes observations sur les peuplades habitant un environnement donné. J’ai visité des villes construites sur de hauts plateaux, des villages établis au creux d’une plaine vallonnée…et le mode de vie changeait d’un habitat à l’autre. C’est sûrement la raison du fait que les Baronnies ne soient pas organisées de la même façon que l’Empire. La vérité est qu’une telle organisation est impossible : les peuples ont plus de différences que de points communs…L’essentiel des cours d’eau abreuvant les terres de l’Empire prennent leurs sources dans les hauteurs de ce pays, qui est de la sorte traversé de nombreux fleuves, se réunissant à peu près au niveau de la frontière. Le climat est aussi diversifié que le relief. En effet, le Nord des Baronnies, sous influence du climat désertique des Terres Barbares, présente des saisons sèches et très chaudes, et les plus basses températures restent relativement hautes. La partie la plus proche de l’Empire bénéficie du climat tempéré de celui-ci, tandis que Sud subit les influences malsaines du pays des Démons. Certains peuples se sont établis sur les hauteurs, où l’air se fait plus rare et où le froid domine. D’autres ont préféré les étendues plates de l’Ouest, où le climat reste favorable. Au fil du temps, ces différentes colonies se sont étendues et ont évolué. Auparavant, il existait peu de relations entre elles. Ce n’est que quand elles ont pris de l’importance que la nécessité de délimiter leur territoire est apparue. Les Baronnies étaient nées. Au nombre de treize, elles sont de taille variable, et ont des activités différentes. La Baronnie de Keleron par exemple, est relativement petite et sa principale ressource provient des mines qu’elle a développées dans les sous-sols des plateaux où elle se situe, alors que celle d’Elys tient sa survie des élevages que sa taille importante lui permet d’entretenir en grand nombre. Les Baronnies sont donc interdépendantes. Il existe d’ailleurs de nombreux accords de commerce, formant comme une toile d’araignée qui relierait chacune d’entre elle à toutes les autres. Cela a amené à une certaine spécialisation : si une Baronnie se spécialise dans la menuiserie car son territoire comprend une voire plusieurs forêts, une autre aurait pour spécialité le textile, car disposant des ressources propices à ce type de commerce. Ainsi, on pourrait croire que les relations soient cordiales voire amicales, car après tout de nombreux échanges les lient. Mais à ma grande déception, j’ai pu constater qu’il n’en était rien. Après tout, les hommes sont tous les mêmes : instables, animées aussi bien par l’amour et l’honneur que la cupidité et la vengeance, capables de pur héroïsme et de scélératesse sans nom…C’est aussi la raison pour laquelle la majorité des guerres qui ont ensanglanté notre monde avaient pour acteurs ces faibles créatures, cherchant sans cesse à s’élever au-dessus d’elles-mêmes, que ce soit en bien ou en mal, luttant pour se prouver qu’ils étaient digne de leur conception de l’honneur et pour conquérir non seulement le mal qui les entoure mais aussi celui qui réside en elles. J’ai toujours éprouvé une certaine pitié pour cette race tourmentée, incapable de s’assurer un avenir brillant, tant leur faiblesse détruit à chaque fois ce qu’ils pourraient péniblement construire…Les Baronnies en sont un exemple parfait. Les incessantes querelles qui opposent constamment certaines d’entre elles ont poussé à quelques dignitaires soucieux de tranquillité d’instaurer un système ma foi ingénieux, si ce n’est l’incapacité des hommes à s’entendre. En effet, chaque Baronnie a des représentants, dont le nombre dépend de son importance. Ceux-ci se réunissent une fois par an afin de discuter des affaires communes et de tenter de mettre en place un plan d’ensemble. Le Conseil des Baronnies se tient à chaque fois dans le Salle du Conseil, à Alden. C’est une ville neutre, située au pied de la montagne Fänthor. Une position géographique avantageuse a permis à cette ville de gagner suffisamment de richesse et de puissance pour acquérir un statu de ville indépendante. Elle reste néanmoins l’enjeu de nombreux conflits, certains dirigeants brûlant de s’approprier ses richesse. Elle représenterait de plus un signe révélateur de la puissance de la Baronnie qui la contrôlerait. Mais pour l’instant, ses dirigeants sont parvenus à garder leur indépendance et leur statut de ville neutre. Toujours est il que c’est ici que se réunissent les représentants de chaque Baronnie, mais comme j’ai pu le constater, rien de concert n’a jamais été décidé, et ne le sera pas avant un long moment je le crains.
Une Baronnie a attiré mon attention. Il s’agit de la plus importante, situe au centre de l’ensemble formé par les treize Baronnies. Ce pays est plus grand, donc forcément plus riche et plus puissant. Spécialisé dans la fabrication d’armement, la Baronnie de Keler entretient l’armée la plus importante et la mieux équipée de l’ensemble des pays humains, après l’armée impériale bien sûr. Son dirigeant, Hypsias semble aussi ambitieux, voire même plus, que le prince impérial Adebyr, ce qui n’augure rien de bon. Il va falloir que je surveille étroitement les agissements de ces humains, au même titre que les dissidents impériaux. Décidément, ces humains ne sont pas dignes de confiance…

Les Terres Barbares

Mon voyage dans les contrées humaines s’est achevé par un périple dans les Terres Barbares. Ici, les hommes sont tombés dans une déchéance totale. Le climat y est aussi désertique que dans les Contrées Sauvages, bien qu’aucune partie de ce pays ne soit recouverte de glaces, et qu’il y persiste encore de nombreuses plaines à la végétation desséchée. L’unique trace d’humidité provient des rares pluies et des quelques fleuves au débit irrégulier provenant des montagnes de la cordillère des Abassydes. Ce climat n’est pas aussi défavorable que celui des Contrées, et a permit à des colonies humaines de s’y répandre rapidement. Les habitants de ce pays étaient au début des parias et autres rebuts bannis sur ces terres par les autorités des Baronnies et de l’Empire. Ces renégats se sont retrouvés en nombre suffisant pour former des sociétés encore plus ou moins avancées. Mais elles ont vite commencé à régresser, pour atteindre un niveau rudimentaire voire primitif, amenant les êtres humains les composant à devenir des barbares cultivant à l’égard de ceux qu’ils jugeaient responsables de leur déchéance une haine implacable. Les peuples humains civilisées qui les avaient rejetés ont vite renforcé leurs frontières, craignant que ces êtres haineux ne se rassemblent et déferlent sur leurs terres. Il s’est en effet produit ce qu’ils attendaient, mais dans des dimensions bien plus importantes. Les barbares s’étaient reproduits à une vitesse hallucinante, et n’ont pas tardé à se rassembler et à lancer une première invasion. Les défenses furent balayées et les barbares se sont enfoncés dans les terres des Baronnies et de l’Empire à de nombreux endroits. Ils furent repoussés par un sursaut de combativité de leurs victimes, qui renforcèrent leurs défenses frontalières. Désormais ce sont des millions d’âmes haineuses qui peuplent ce pays, et régulièrement de véritables hordes se rassemblent et se jettent contre les défenses des deux cibles de leur haine aveugle. L’organisation de ce peuple est anarchique. Il m’a semblé que les barbares se sont divisés en clans, dont les chefs doivent faire preuve de force et se montrer plus puissants que leur rivaux pour s’imposer. C’est une véritable compétition, dont l’issue pour les perdants est la mort inéluctable. Rares sont néanmoins les chefs qui parviennent à unir tous les clans sous une seule bannière, aussi les Baronnies et l’Empire n’ont selon moi pas grand-chose à craindre, du moment qu’ils restent vigilants…